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L’opposition estime que Pachinian a engagé sa campagne pour les prochaines législatives en faisant le ménage au sommet de l’Etat
Pour l’opposition arménienne, le doute n’est pas permis : le grand coup de balai que vient de donner le premier ministre Nikol Pachinian au sommet de l’Etat, en poussant à la démission six hauts responsables accusés de ne pas en avoir en avoir fait assez dans leurs domaines respectifs, donnerait le coup d’envoi de sa campagne pour les prochaines élections législatives, ont affirmé lundi 18 novembre les leaders de l’opposition. Selon eux, le dirigeant arménien ferait le ménage en vue d’ouvrir une nouvelle séquence politique, et ferait table rase du paysage politique censé le desservir, de même qu’il vient de se raser la barbe qu’il avait gardée depuis la révolution de velours qui le porta au pouvoir en mai 2018, un changement de physionomie qui peut paraître anecdotique mais qui a prêté à de très sérieuses spéculations sur le nouveau départ ainsi annoncé, dans un pays aux fortes traditions patriarcales développant toute une symbolique autour de la pilosité. Les démissions de deux ministres du gouvernement et des chefs de l’instance de supervision de l’appareil judiciaire et du service des taxes et des douanes ainsi que deux autres départements relevant de la justice avaient été annoncées dans la matinée, trois jours après une charge de Pachinian qui avait publiquement déploré le manque persistant de “justice” dans le pays. “Chers représentants du système judiciaire et sécuritaire, ma patience est à bout” avait déclaré le premier ministre lors de la réunion hebdomadaire du conseil des ministres jeudi à Erevan, en reconnaissant ainsi l’échec des réformes afférentes qu’il avait annoncées vouloir mettre en œuvre des années auparavant. Les représentants des deux principales formations de l’opposition arménienne ont désigné cette charge et les démissions en cascade qui ont suivi comme une opération de communication visant à inverser la tendance d’une impopularité croissante de Pachinian. Pour ses opposants, Pachinian craint tout simplement de perdre les élections générales prévues en juin 2026 et cherche à faire croire aux Arméniaens qu’il n’est aucunement responsable des échecs de son gouvernement et qu’il est en mesure de redresser la barre. “Il essaie de sauver sa popularité en chute libre, en espérant pouvoir détourner sur les responsables qui ont connu le sort de sa barbe [rasée depuis peu] la colère et la déception légitimes du peuple”, a écrit Levon Kotcharian, un député de la principale alliance d’opposition Hayastan, sur sa page Facebook. Kocharian, dont le père Robert Kotcharian a été président de la République d’Arménie de 1998-2008 et dirige actuellement l’alliance Hayastan, s’est dit convaincu que les électeurs ne seront pas dupes car ils savent parfaitement désormais que Pachinian est “celui qui décide des questions dans toutes ces agences”. Tigrane Abrahamian, un autre député de l’opposition représentant l’alliance Pativ Unem, a déclaré pour sa part que Pachinian ne pouvait plus marquer des points auprès des Arméniens en cherchant à capitaliser sur des poursuites judiciaires visant leurs anciens dirigeants, y compris Robert Kotcharian. Il pourrait donc commencer à “sacrificier ses propres équipiers” en prévision des élections, a ajouté Abrahamian devant les journalistes. En début d’année, la presse arménienne spéculait sur l’éventualité que Pachinian convoque des élections anticipées dans le but de prendre à comtre-pied une opposition qui semblait alors plus combattive et menaçante et d’accroître ses chances de conserver le pouvoir. Certains spécialistes plutôt critiques à l’encontre du gouvernement estiment que la récente vague de démissions montre aussi qu’un tel scénario est possible. De son côté, le leader du groupe parlementaire du parti Contrat civil au pouvoir, Hayk Konjorian, a souligné que les six responsables avaient été poussés vers la porte de sortie parce que Pachinian était mécontent de leur bilan, sans toutefois préciser en quoi ils l’auraient déçu. “Le people en Arménie a une exigence de justice”, s’est contenté d’affirmer Konjorian, en ignorant les objections de l’opposition selon lesquelles les dernières démissions confirmeraient entre autres la main mise de Pachinian sur un système judiciaire dont il entendait renforcer l’indépendance et à qui il reproche notamment de ne pas avoir été en mesure de sanctionner les tenants de l’ancien régime, comme Robert Kotcharian, qu’il s’était fait fort de les traduire en justice, dès son accession au pouvoir.